J’ai récemment revu une amie de l’université. Lorsque je lui ai expliqué ce que je fais dans la vie, elle m’a posé des questions au sujet des nombreux e-mails qu’elle a reçus concernant la confidentialité des données. Je lui ai donc parlé du Règlement général sur la protection des données, la nouvelle réglementation européenne – qui, dans les faits, concerne le monde entier – portant sur la confidentialité des informations, et de son importance pour elle en tant que consommatrice. Au cours de discussions que j’ai eues par la suite avec mes collègues, j’en suis venue à considérer sa véritable portée sur notre secteur, ainsi que son impact réel.
Le Règlement est entré en vigueur il y a maintenant plusieurs mois. Il est donc temps de prendre un peu de recul par rapport au déluge de demandes de consentement et de mises à jour des politiques de confidentialité auquel nous avons assisté, et de nous pencher sur ce qu’implique le RGPD à plus grande échelle, ainsi que sur les opportunités qui peuvent en découler.
Avant de poursuivre, il est important de revenir sur la notion de RGPD, qui est peut-être encore un peu floue pour certains. Alex Krylov, expert en conformité chez Cheetah Digital by Marigold , nous donne l’explication suivante :
L’essence même du RGPD consiste à exiger des entreprises qu’elles intègrent la notion de confidentialité à leurs activités commerciales et à leurs produits de base de manière intentionnelle. Les activités liées au traitement d’informations doivent être légales, transparentes, proportionnelles et compensées par les droits et les intérêts des individus dont les données à caractère personnel sont susceptibles d’être manipulées. L’un des problèmes que rencontre toujours notre secteur d’activité, et auquel il doit constamment s’adapter, concerne le consentement des consommateurs, qui doit être donné « de façon libre, spécifique et univoque ». En d’autres termes, il faut être vigilant concernant le moment et la manière dont les données sont collectées. Le consentement constitue l’une des « six bases légales » sur lesquelles les entreprises peuvent s’appuyer pour justifier le traitement d’informations. Bien qu’il ne soit pas rendu obligatoire par le RGPD en ce qui concerne le marketing direct, il l’est par la directive Vie privée et communications électroniques. Cette dernière traite spécifiquement des activités de marketing en ligne et de publicité interactive.
On en revient toujours aux données, qui sont l’essence même de tout programme de marketing digital, indépendamment de son niveau de sophistication. Les données à caractère personnel protégées par le RGPD incluent tous types d’informations sur les consommateurs, de leur adresse e-mail à leur identifiant de cookie en passant par l’endroit précis où ils se trouvent. Cela concerne tous les éléments susceptibles d’aider à suivre quelqu’un à la trace, même si cela ne permet pas de l’identifier.
Dans un monde régi par le RGPD, il est essentiel pour les experts en marketing de tenir compte des éventualités suivantes :
Une directive similaire pour les États-Unis ?
Bien que la frénésie soit légèrement retombée, il y a encore des nuages à l’horizon pour les spécialistes du marketing américains. Selon une étude menée par Janrain, 68 % des consommateurs américains souhaitent que des législations similaires concernant la protection des données entrent en vigueur aux États-Unis. Cela n’a rien de surprenant au vu de la vague de brèches de sécurité qu’ils ont récemment essuyée et de leur manque de confiance concernant le traitement des données à caractère personnel.
La fin des cases précochées ?
La directive Vie privée et communications électroniques exige des entreprises qu’elles obtiennent l’accord des consommateurs avant d’effectuer des actions de marketing en ligne et afin de stocker leurs données ou d’y accéder sur l’appareil d’un utilisateur (par exemple, dans un cookie). Cependant, elle ne donne aucune indication quant au mode de collecte de cet accord. À son tour, le RGPD définit aujourd’hui la notion de consentement permettant d’utiliser les données dans le cadre de la directive Vie privée et communications électroniques, sans toutefois être particulièrement précis. Ce qui ne fait pas le moindre doute, c’est que les consommateurs doivent donner leur accord ouvertement et en toute connaissance de cause pour recevoir des éléments tels que des e-mails marketing.
De nombreuses techniques d’acquisition exposeraient les entreprises à un risque élevé en Europe, ainsi qu’au Canada. Bien sûr, on pense tout de suite aux bonnes vieilles cases précochées. Souvent petites et dissimulées, elles n’ont pas pour but d’inciter les abonnés à les décocher. Alex Krylov les surnomme les « bêtes noires des experts en confidentialité et des spécialistes de la délivrabilité ». Soyez prudent et adoptez une approche claire pour obtenir le consentement de vos abonnés.
Le recours aux parties tierces en passe de disparaître
Cheetah Digital by Marigold , tout comme les autres membres du secteur appartenant à la même alliance, ne cautionne pas l’achat ou la location de listes d’e-mails. Par ailleurs, les marketeurs s’adonnant à ce type de pratique s’exposent à de sérieuses sanctions, maintenant que le RGPD est entré en vigueur.
S’il est collecté par un tiers, il sera difficile de prouver que le consentement n’est pas « univoque ». Dans un article pour Marketing Land, Alex Krylov a déclaré que
l’obligation d’obtenir le consentement des consommateurs en vertu du RGPD sera l’une des principales raisons qui inciteront les entreprises à envisager autrement leur utilisation des données tierces. Beaucoup de motivations poussent les spécialistes du marketing B2B à se concentrer sur l’engagement et la collecte de données organiques. Ils ont suffisamment de sources d’inquiétude : voir leurs e-mails filtrés avant d’atteindre les boîtes de réception ciblées, gâcher leurs dépenses marketing, manquer des opportunités d’interactions plus personnelles et ternir leur réputation au moment où le monde entier se préoccupe des abus dans le domaine de la confidentialité.
Des listes moins fournies
Pour le meilleur comme pour le pire, de nombreuses marques jaugent leur succès selon la taille de leur liste de diffusion. Étant donné que les abonnés doivent désormais spontanément accepter de recevoir des e-mails, beaucoup d’entre elles ont dû redemander la permission à l’intégralité des personnes inscrites dans leur base de données. Si tel est votre cas, vous avez probablement l’impression de devoir tout recommencer à zéro. En effet, soit vos abonnés ont ignoré les e-mails de demande de confirmation, soit ils ne les ont pas vu passer. L’auteur d’un article indiquait même avoir été ravi de constater qu’il n’avait pas besoin de se désabonner auprès des marques. En effet, l’e-mail de confirmation qu’il avait reçu indiquait que, sans réponse de sa part, son nom serait retiré de la liste de diffusion. Bien que nous ne souhaitions pas voir nos clients partir, il est préférable d’épurer nos bases de données ou de laisser à nos clients la possibilité de se désabonner, plutôt que de s’exposer à des poursuites (ce qui est déjà en train de se produire).
Un chiffre d’affaires en baisse
Une liste de diffusion plus réduite peut impliquer un chiffre d’affaires moins élevé. Si votre message cible moins de personnes, il y aura forcément moins de clics et par extension moins de conversions. D’un autre côté, les personnes les plus engagées auprès de votre marque, celles qui sont probablement à l’origine d’un volume de revenus régulier, vous donneront facilement leur consentement. Pour ceux qui ont peut-être manqué cette opportunité, envisagez de demander à vos acheteurs de s’abonner à vos e-mails marketing lors de l’envoi des communications liées à leur commande, à l’expédition de cette dernière ou à la confirmation de livraison. Il s’agit d’un procédé qui existait déjà pour les nouveaux clients, mais ces campagnes de réengagement peuvent également vous permettre de garder contact avec vos clients actuels.
L’attrait pour la personnalisation
Comment faire savoir aux consommateurs que nous les connaissons sans les mettre mal à l’aise en raison des informations que nous détenons à leur sujet ? Revenir à des campagnes statiques n’est pas une solution. Vous devez en revanche inclure des contenus qui ajoutent de la valeur à vos communications, de manière organique, comme des éléments interactifs en temps réel. Vos messages doivent par ailleurs se conformer aux principes du RGPD concernant la confidentialité des données et la transparence de leur traitement. Alex Krylov a plutôt bien résumé tout ceci.
En vérité, il y a encore beaucoup de zones d’ombres, et personne ne se conformera réellement au RGPD avant au moins deux ou trois ans, le temps que la lumière se fasse. Les acteurs de l’écosystème digital, qui est particulièrement fluide, vont devoir adopter une approche continue et itérative
Pour les spécialistes du marketing, le RGPD et ses conséquences constituent à la fois un défi et une opportunité.
Remarque : Cet article a été rédigé à des fins d’information et ne constitue aucunement un avis juridique.